20 DÉCEMBRE 2001 – 20 DÉCEMBRE 2021 : MA DOULOUREUSE LETTRE À MON SENGHOR À MOI OU LA TRAGÉDIE D’UN TESTAMENT CONFLICTUEL !

Publié le 17/12/2021
Amadou Lamine Sall

Mon cher poète bien-aimé, comme chaque fin d’année depuis que le voilier, le 20 décembre 2001, s’est abîmé de l’autre côté de l’horizon inaccessible à notre vue d’humain, je vous écris pour vous conter la vie quotidienne du peuple sénégalais ainsi que la marche du monde, dans son actualité. Mais cette année 2021 est particulière. Terrifiante, même.



Mon poète, sachez que j’étais terrifié par l’idée de la mort. Vous-même disiez que vous n’aviez pas peur de la mort, mais du néant. Avec mes dix fois sept ans, je me suis habitué à mieux l’appréhender. La mort n’est pas un jeu. La Covid19 est passée par là !

Mon cher poète, votre nom comme votre œuvre tiennent toujours salon. Vous habitez encore toutes les géographies. La station de  métro Saint-Germain à Paris, vous fête d’ailleurs en ce décembre 2021. Vous y êtes présent, penché sur un livre. En vérité, vous n’avez jamais quitté le cœur de ceux qui vous ont aimé comme de ceux d’ailleurs qui vous ont mis de méchantes moustaches. Mais mettre des moustaches à la Joconde c’est vraiment en vouloir non à la muse mais à l’art tout entier ! Vous nous avez toujours dit que vous n’aviez pas tout réussi. Que Dieu Seul pouvait tout réussir ! Quelle humilité !

En pensant à vous, je repense toujours à la Grandeur de notre Seigneur ! Je vois ce jeune garçon sérère débarquant pour la première fois à Dakar et qui dit être ébloui par les lumières de la ville. Et dire que c’est ce jeune garçon qui, un jour, est devenu président de la République du Sénégal. Et vous dites en 1975 au célèbre journaliste Jacques Chancel ceci : « Les Chefs d’État ne sont pas des hommes extraordinaires… »

Mon cher poète, j’ai décidé de commencer cette lettre par cette tragédie qui a fini par déchirer votre testament écrit avec ce souhait que vous aviez exprimé d’être enterré à Joal. Mieux : vous vous êtes rendu vous-même à Joal pour y construire votre caveau. La Fondation Senghor dirigée par votre fidèle d’entre les fidèles, Moustapha Niasse, a, par plusieurs fois, réuni son Conseil d’Administration en présence de la famille Senghor, pour échanger, discuter, organiser ensemble la cérémonie de rapatriement de votre cercueil ainsi que  ceux de vos si chers proches, votre épouse, Colette,  la solaire et Philippe Maguilen votre « tutsi » comme vous l’appeliez, si affectueusement.

La date du 19 décembre 2021 avait été retenue d’accord partie avec votre famille, le maire de Joal, pour la cérémonie d’accueil à Joal, avec messe, avant la mise en caveau des trois corps. Le lendemain, 20 décembre, 20 ème jour anniversaire de votre décès, avait été retenu comme le 1er anniversaire de votre repos à Joal. Conformément à vos souhaits qui furent  confirmés par votre chère Normande avant qu’elle ne ferme pour l’éternité ses beaux  « yeux pers », « ces yeux de soir de réception » comme vous l’écriviez. Et en la saluant, à vos côtés, au palais présidentiel, les jours de réception d’État, ce n’est pas vous que je regardais en vous serrant la main, mais les yeux de Colette.

Mon cher poète, votre lettre épitaphe, vœu d’être enterré sous Joal, sont à jamais compromis ! Rien de tout cela ne se fera. La nouvelle est arrivée, cruelle, inacceptable, inopportune, triste, terrible, imparable. Votre famille maternelle -que je salue avec respect-s’est levée pour s’opposer à la décision prise avec votre branche paternelle et les membres de votre Fondation, pour décider que vous resteriez à Dakar, au cimetière de Bel-Air et que personne, personne ne tente d’aller à l’encontre de cette décision.

Mon cher poète, il faut tout dire aux Sénégalais et à tous ceux qui s’étaient déjà préparés de par le monde pour venir vous accompagner à Joal. Il est difficile d’accepter une telle décision. Mais nous ne sommes rien d’autre que vos amis. Rien d’autre. C’est bien à votre famille de décider, à votre sang de gouverner la décision finale. Nous ne pouvons que nous y soumettre.

Nous n’accuserons personne d’être allé contre les vœux de votre testament écrit sous forme d’épitaphe célèbre. Chacune des deux branches de votre noble famille suit son cœur. Il est difficile d’arbitrer deux cœurs opposés. D’ailleurs, il ne s’agit même pas d’arbitrer. De quel droit devrions-nous arbitrer, car nous ne sommes que des amis, d’humbles disciples ? Mon cher poète, informé de cette posture qui remettait tout en cause, j’ai saisi par écrit le président de votre illustre Fondation, Monsieur Moustapha Niasse, l’inégalable fidèle. 

Lisez donc cette missive, mon Sédar, en ces termes ici raccourcis et ré-étoffés : «  Si cher, très cher Président Niasse, avec mon  respect et mon affection sans nom, je suis meurtri par ce  qui m'a été finalement rapporté et venant de la « branche paternelle » de notre cher maître. Cela a réduit à néant tout le travail et tout l'espoir qui étaient placés dans le programme établi, sous votre admirable conduite, en présence des membres du conseil d'administration, du maire de Joal et de la famille de Sédar. Il s'agissait, en effet, de rapatrier les trois corps le 19 décembre et de commémorer le 1er anniversaire du retour de Senghor à Joal, le 20 décembre 2021.

Je suis allé ce jeudi 18 novembre 2021, parler à H. Senghor, puis à M. Senghor, puis à A. Senghor. Cette dernière m'a tout dit, tout raconté. Elle faisait partie de la délégation qui s'était rendue à Joal puis à Djilor, pour y rencontrer la famille maternelle du maître. L'accueil fut froid : « Ne touchez pas à Senghor ! Laissez-le reposer à Bel-Air. Notre famille refuse tout compromis. Notre décision est prise et elle est irrévocable. Senghor a d'ailleurs écrit une lettre au Cardinal Thiandoum, pour lui signifier qu'il souhaitait être enterré à Bel-Air. »

J'ai demandé à A. Senghor si la famille maternelle possédait réellement cette lettre. Elle m'a répondu qu'elle ne savait pas, mais qu'elle même avait largement entendu parler de cette correspondance et de son contenu. Moi, « Salma », Amadou Lamine Sall, j'ai lu cette lettre. Elle est manuscrite. J'en possède une copie. En la lisant longuement et patiemment, j'ai compris. J’étais défait. Anéanti. En nous référant au fameux et célèbre poème épitaphe de Senghor, il  invitait ses « amis » à l'enterrer en terre joalienne. Ce qui est difficile à récuser ! Senghor avait tenu à confier ce poème épitaphe directement et secrètement à des amis qu’il avait soigneusement choisis, pour que ce poème épitaphe ne se perde pas. Mais les choses, finalement, n'ont pas été aussi simples. Elles ne le seront pas. Elles ne le seront plus. Sa famille a et aura le dernier mot. Pas nous, ses amis. C’est ainsi. En effet, au regard de ce que A. Senghor m’a raconté et après avoir lu moi-même la lettre manuscrite que Senghor a adressée au Cardinal Hyacinthe Thiandoum, tout nous condamne désormais à la prudence, au consensus si celui-ci peut encore être envisagé. Pour ma part, je n’y crois pas. Puissé-je ne pas avoir raison !

Monsieur le Président Niasse, le maître  n'a pas seulement écrit dans cette lettre manuscrite au Cardinal Thiandoum, depuis Verson, et datée du 10 août 1992, ceci : « ... lorsque l'heure sera venue, ce n'est pas à Joal que je veux être enterré, mais au cimetière catholique de Dakar, avec mon fils Philippe. » Le maître rajoute hélas ce qui allait créer le trouble, donner le jackpot à ceux qui cherchent à le garder à Bel-Air : «  En effet, contrairement à ce que j'ai pu écrire dans un poème... ». Voilà ce qu'il ne fallait pas peut-être pas écrire. Cela a généré des positions inconciliables. La branche maternelle de Djilor a choisi le camp du statut quo, se fondant sur les écrits du maître au cardinal Thiandoum. Difficile dès lors, de lui en vouloir.

Troublé par cette lecture, je suis allé me réfugier auprès du brillant et redoutable avocat, l'ami bien-aimé, maître Boucounta Diallo,  pour trouver une possible et crédible interprétation en faveur de ceux, très nombreux, qui souhaiteraient que Sédar repose bel et bien à Joal. Boucounta me dit ceci : «  Si tu savais combien je suis découragé ! Cette lettre au Cardinal Thiandoum est à replacer dans son contexte de 1992. Il s'agissait, en ce temps-là, d'un enterrement à Dakar. Mais les positions ont évolué de 1992 au 20 décembre 2001, soit près de neuf ans, après.» Par « les choses ont évolué », maitre Boucouta Diallo voulait rappeler, comme témoin, ce que Colette avait dit : « Gardons mon mari à Dakar, pour que cela soit plus aisé pour moi d’aller prier sur sa tombe. A ma disparition, exécutez son vœu : que tous les trois nous allions enfin reposer ensemble sous Joal ». Pour ma part, ce que je regrette, c’est que ces paroles vraies et attestées, n’aient pas été écrites. Et même si elles avaient été écrites, que vaudraient-elle face à l’argument et à l’implacable posture de la branche maternelle de Senghor 

Monsieur le Président Niasse, j'ai écouté ceux qui ont tout tenté pour trouver un consensus familial en se rendant à Djilor. J'ai aussi écouté ceux qui voulaient parler, intervenir, dénoncer la posture métallique de la famille maternelle. Il ne semble plus rester grand' chose à attendre. C’est mon intime conviction. Malgré notre peine à nous les amis fidèles qui avions rêvé et lutté pour que Senghor retourne reposer à Joal. Nous devons œuvrer pour  la paix et la réconciliation familiale. L’essentiel n’est peut être pas que Senghor repose sous la terre de Bel-Air ou de Joal ou de Djilor. L’essentiel est qu’il repose toujours  dans nos cœurs. Si quelque chose doit compter et être retenu, c’est cela seul. Les chants et la poésie de Senghor garantissent à jamais la légende de Joal et de Djilor aux noms si beaux. Et je suis de ceux qui croient que le maître se réveille à Joal, Djilor, Mbissel et qu’il marche d’un pas sûr de berger sur les  terres du royaume d’enfance !

Nous partirons aussi un jour rejoindre Senghor. Les dernières sentinelles, veilleurs de jour comme de nuit que nous sommes, n'auront pas réussi à exaucer le dernier vœu du maître. Il nous le pardonnera. Nous lui expliquerons. D'ailleurs, il sait déjà. Il sait toujours tout. Il nous devance. Maintenant, pour adoucir notre dooleur, hâtons-nous d'installer la Fondation dans l'avenir. Un avenir tranquille qui perpétuera pour toujours la mémoire de Sédar. Dans l'avenir, il n'existera pas un autre Moustapha Niasse! Pas un autre Boucounta Diallo ! pas plus que les professeurs Amadou Ly, Saliou Mbaye, Abdoulaye Elimane Kane, Aminata Sow Fall…  Il n'existera plus un directeur général comme Raphaël Ndiaye. La différence ne sera pas dans la compétence mais dans l'ADN unique des femmes et des hommes qui ont été ses compagnons proches et si aimants. J’ai vu pleurer Monsieur le Président Niasse, rien qu'en regardant la photo de Senghor. Dans 25 ans, personne ne pleurera plus. Non pas parce que ceux qui viendront demain ne sauront pas pleurer, mais parce qu'ils ne pourront pas pleurer ! Ne pleurent que ceux qui savent ! De tels hommes ne peuvent plus exister. » Fin de ma lettre à Niasse.

Mon cher poète, Jean Pierre Langellier qui vient de publier « La grande biographie de Léopold Sédar Senghor, l'homme qui jeta « des ponts entre deux univers », chez Armand Guibert, était l’invité de France Culture le lundi 13 décembre 2021 dans l’émission « Sans oser le demander ». Il raconte le refus de votre puissante branche maternelle de vous voir enterrer à Joal  et non pas à … Djilor. Où a t-il donc pris cette information ?

Mon cher Sédar, ceci n’aurait pas dû être écrit ici, mais j’ai le cœur gros, et permettez que par une courte parenthèse - et je l’assume seul, car la haute et savoureuse courtoisie du bien-aimé Moustapha Niasse me l’aurait interdit -, je puisse évoquer un jeune français, un garçon qui vous avait été confié et que vous avez beaucoup aimé et protégé. Un jeune homme qui a toujours, dit-on, a tort ou à raison, su glisser entre les protocoles, les distinctions, les amitiés juteuses. Il s’est constitué mécène. Il est élégant, inévitable, séducteur, cultivé, convaincant, troublant, attachant et émouvant. Nul ne peut contester qu’il ait porté très loin votre nom et vos œuvres. Il est présenté dans Google comme un ancien conseiller culturel de Léopold Sédar Senghor entre 1972 et 1982. Il y est dit et écrit qu’il « gère le fond muséographique Senghor. Qu’il conserve toutes les peintures qui illustraient les textes de Léopold Sédar Senghor signées par Marc Chagall, Pierre Soulages, Alfred Manessier, Maria Helena Vieira Da Silva, Zao Wo Ki, Hans Hartung, Étienne Hadju, André Masson. Pablo Picasso, Hans Hartung, Philippe Sène, ont aussi créé gouaches et lithographies pour Senghor.» Et tout lui appartient. Nous en savons plus que Google sur G.B. Il reste un frère inévitable. Seul Senghor compte et Senghor compte pour G. B. A sa manière.

C’est l’immense peintre Ladislas Kijno qui nous dit ceci de si touchant : « La peinture est un métier qui tue. D’une façon ou d’une autre, il faut y laisser sa peau. ». La fidélité cosmétique, rentable et exhibitionniste, est également une parure qui tue. On y laisse toujours plus que sa peau : on y laisse son nom, sa dignité, son éthique, une légende fissurée et nauséabonde. La fidélité à Senghor de G. B. puisque c’est de lui dont il s’agit, mon cher poète bien-aimé, est multiple : il vous aime pour le père que vous avez été comme président de la République. Il vous aime pour le grand esprit que vous êtes. Il vous aime pour la faiblesse et la confiance désintéressée dans lesquelles vous l’aviez placé, en lui laissant innocemment gérer votre propre patrimoine artistique dont il est de nos jours le bienheureux, tenace et unique gérant. Rien à Senghor. Rien à votre Fondation ou à vos héritiers. Les biens laissés dans la maison de Colette Senghor après sa mort, à Verson, c’est G. B. qui nous informe qu’ils ont été répertoriés comme biens d’une citoyenne française pour faire valoir ce que de droit. Quelques confidences imprudentes suivent. Le fameux tableau de Soulages vendu aux enchères en France pour un peu plus d’un milliard de FCFA et qui a soulevé tant de questions et d’indignation, G.B. nous a raconté la vérité de l’histoire. Elle peut mener à une crise cardiaque ! Tout est dit ! A la question de savoir ce que lui-même pouvait personnellement faire pour accompagner tant soit peu la Fondation Senghor en difficulté financière, il a répondu raide, altier, impassible et sans trembler : « je ne peux rien faire ! » Il gère tout ce patrimoine avec doigté, ruse et appétit, avec amour aussi, entouré de barbelés souvent troués par l’actualité internationale libre et transparente des marchés de l’art. G. B. est malgré tout de la famille. Il est trop tard d’oser dire le contraire.

Si cher poète, vous nous avez appris à nous aimer, à être grand, à s’élever, quand il s’agit de se retrouver autour de votre nom et de ceux que votre regard, un seul jour, a archivé dans votre cœur. Mais, il y a longtemps que le jour s’est levé dans les tunnels. Des masques tombent. La fidélité a un prix. Certains ont de lourdes dettes. Nous ne ferons pas ici de la diplomatie. Nous refusons d’obéir. Nous écrivons l’histoire. La vérité. Et cette vérité n’est pas belle mais ceux qui trichent mais qui ne font pas semblant de vous aimer et qui vous aiment à leur manière, sont encore moins beaux !

Mon cher poète, laissez-moi fermer cette lettre que je vous adresse en ce 20 décembre 2021. Une année ne sera pas plus pénible, sombre, douloureuse, cruelle, vengeresse, coupeuse de routes, coupeuse de vies admirables arrachées à notre affection. La Covid19 est passée par là. La mort et la peur couvrent le monde. Les versants des montagnes s’effondrent et avec eux de grands et beaux esprits qui ne reviendront plus. Au Sénégal, Macky Sall, admirable, impassible mais souffrant et blessé, est en haute mer, debout seul face à tous les vents et fouetté jusqu’au sang. Mais il s’épuise à la tâche, portant son rocher, l’esprit montagneux et l’œil lointain. C’est tout un pays qui est en chantier mais c’est aussi tout un peuple qui cherche son pain.  C’est le prix de sa mission. La politique aussi est un métier qui tue. On y laisse toujours sa peau, d’une manière ou d’une autre. Un président de la République en exercice est encore plus solitaire que déchu et désormais seul. Sans lambris.

Et dans le monde, mon cher Sédar, chez cette France bruyante, habile, désunie, ambivalente, conflictuelle mais aux intellectuels et créateurs à l’esprit raffiné, aux politiques  à l’idéal démocratique invincible, est apparue une étrange bête algéro-française, ossifiée,  répulsive mais tragiquement cultivée, reptilien au visage de lame de rasoir et qui proclame une France pur beurre, moins arquée, moins tolérante, plus sélective, plus répressive, oppressive, prédatrice de toute impureté, gluante pour faire déraper les hordes nègres et arabes, envahisseurs aux pieds sans chaussures. Il s’agit de réussir la purification de la France, clame t-il, en s’oubliant comme algérien mais se voulant assimilé jusqu’à la moelle des os. De son nom Éric Zemmour, ou mieux encore : Zemmouroïde, car il donne, en effet, des hémorroïdes à toute la France. Ne jamais oublier, que de Clovis à Vercingétorix, l’histoire de la France est une histoire de conquête métisse. C’est l’Abbé Pierre qui rappelait toujours qu’aussi loin que l’on puisse remonter, il n’existait presque pas un seul français pure souche. La France ce sont « des » racines et non « une seule » racine. La preuve en Zemmouroïde lui-même, algérien bénéficiant du droit du sol.

Tiens, Angela Merkel née Kasner, 67 ans, chancelière fédérale d’Allemagne, quitte le pouvoir après 16 ans et 16 jours. On aurait hurlé à la dictature en Afrique !

Mon si cher Sédar, j’ai appris à bien dormir en pensant à votre vœu, à votre magnifique poème épitaphe qui nous invite à vous enterrer en terre joalienne. Des Sages de Joal, n’est-ce pas l’ami fondamental Raphaël Ndiaye, n’ont-ils pas déjà dit que depuis le 20 décembre 2001, Sédar est arrivé à Joal ? Qu’il y repose ? Que le caveau du cimetière de Bel-Air à Dakar est bien vide ? Que Sédar vient rejoindre chaque soir les initiés et sous le pont, ensemble, devisent tard, très tard ? N’est pas Senghor qui veut ! N’est pas Sédar qui peut ! Dis-nous mon flamboyant, toi Sédar le palmier, le caïlcédrat, le baobab, mon cher poète dis-nous, si sous le pont de Joal, tu chantes jusqu’au petit matin avec les grands « Salma » du royaume du Sine ? Votre vie ? Une œuvre d’art ! Sédar !

Amadou Lamine  Sall - poète - Lauréat des Grands Prix de l’Académie française