Tous les pays sont beaux ! Tous les peuples sont beaux ! toutes les langues sont belles ! Mais les systèmes économiques et politiques ne sont pas beaux. Les hommes politiques : des horloges qui ne donnent jamais l’heure ! Leur slogan : « Je suis responsable de ce que je dis, mais je ne suis pas responsable de ce que tu as compris ». La politique et ses redoutables appétits régissent le monde. Ils installent les conflits, les guerres, les injustices, les discriminations, la pauvreté, la corruption, la dictature, l’analphabétisme, le désespoir. Rarement la paix, l’abondance, l’égalité.
Et le monde continue de tourner et il tournera encore longtemps ainsi. Les hommes politiques passent en laissant de lourdes blessures. Certains sont vite oubliés, jusqu’à leur nom. D’autres restent dans les cœurs. Voilà sans doute pourquoi l’on dit à juste raison, même si l’élégance n’y est pas, que « les hommes politiques et les couches doivent être changés régulièrement, pour les mêmes raisons. » Les peuples se constituent, se renouvellent, évoluent. Les cimetières mettent fin à la vie des pauvres, des puissants et des riches. C’est l’endroit idéal où la démocratie prend sa véritable signification. Ainsi aller la terre avant nous. Ainsi elle ira après nous, avec des morts plus heureux souvent que les vivants. Des vivants plutôt déjà morts, mais qui luttent, qui croient, qui espèrent.
Venons-en respectueusement - quoique -à la France !
Dans une actualité acide de l’Afrique en marche, comme un hymne de braise, il est demandé presque partout en Afrique à la France de « dégager » ! Non ! Ce qui doit plutôt « dégager », et vite, c’est cet esprit cynique et dominateur de la France, mais pas la France. Nous avons fait de beaux enfants avec sa langue et ceux qui l’insultent, en l’assumant fièrement, usent de la force et de la magie de sa langue pour faire mouche ! La France doit rester avec nous, en sachant que c’est désormais l’Afrique qui choisit son destin et pas elle. A la vérité, elle n’est pas la seule coupable. Plus coupables encore, les Chefs d’États africains qui se laissent faire et qui ont même franchi les portes de l’église ou de la mosquée avec la belle Marianne ! Mais l’amour ne saurait être condamnable ! A la vérité, face à l’incroyable soumission de certains chefs d’États africains, c’est que si u ne sais pas ce que ton pays vaut, un quidam l’achètera au prix qu’il veut. La Chine, la Turquie, la Russie, l’Inde, le Pakistan, la planète des Émirats arabes, tous les pays et au-delà, ont leur place en Afrique ! Sans doute finie la France toute seule en première classe ! Le nouvel aéronef mondial nous dicte désormais un autre service de cabine et de menus !
Certes, l’histoire coloniale et post-coloniale reste douloureuse et trop injuste, mais elle ne peut être ni oubliée ni effacée. Mais elle doit être dépassée. Bien sûr, tous les enfants de France ne sont pas coupables de cette tragédie et doivent la condamner au nom des droits de l’homme et des peuples ! Il faut un nouveau peuple de France généreux, travailleur, instruit, voyageur, respectueux des autres, soudé et nourri à la divine devise de sa République ! Faisons de la sorte que ce qui la liera désormais avec l’Afrique, soit plus noble que ce qui nous a divisés ! C’est à la France de décider et d’ailleurs, elle n’a pas le choix. En plus, dit-on crûment dans les livres d’histoire, de nous avoir sucé notre sang près de trois siècles, elle est partie avec nos veines. Mais notre cœur est resté. Pour paraphraser une célèbre citation, ce que la France ne savait pas, c’est que nos veines repoussent toujours. La culture sera toujours plus forte que l’envahisseur ! Juste laisser le temps faire !
Merci cependant pour la langue de France, si belle, qu’elle a apportée et que nos richissimes et fécondantes langues d’Afrique ont hébergée et nourrie. Merci à vos poètes, vos écrivains, vos penseurs, vos artistes, qui ont tant apporté au monde. L’Afrique, bien sûr, depuis l’Égypte, a tenu la main de la Grèce et forgé son esprit. Son art a réinventé Picasso et rempli tous les musées de France et de Navarre ! Cependant, haro sur les hommes politiques français qui, chacun avec son style et son paternalisme, a perpétué l’injustice, les combines, la ruse reptilienne, la dépendance habile, les razzias répulsives et gluantes. Ils ont oublié sous les lambris de l’Élysée les lourdes dettes impayées de la France à l’Afrique. Tous les trésors de l’hexagone n’y suffiraient pas. Mais le respect et la reconnaissance peuvent tout solder.
Monsieur le Président Macron, vous l’avez compris en allant à la rencontre de la jeunesse africaine. Ce geste est lumineux et ne saurait être condamnable. Et cette jeunesse qui a choisi de répondre à votre appel a du cœur et des responsabilités. On dit chez nous que « dans la vie, tu as deux choix le matin : soit tu te recouches pour continuer tes rêves, soit tu te lèves pour aller les réaliser. » Cette jeunesse a eu raison de venir répondre à votre invitation. Ce qui devait être dit a été dit par chaque camp avec courage. A chaque camp d’en tirer des leçons. Personne ne s’est agenouillé devant l’autre et chacun est reparti chez lui avec ses genoux. Mais il nous a semblé, Monsieur le Président Macron, chemin faisant, que le poids de la raison d’État, la volonté de maintenir le supposé rang de la France – même si on sait que ce rang est depuis longtemps perdu –, le vaniteux sentiment d’invincibilité, tout cela a ramolli et freiné votre noble élan.
Puissions-nous, nous tromper, en vous entendant dire avec courage et lucidité au complexe peuple de France, à vos plénipotentiaires, à l’Europe, « que le temps du monde n’est plus le même. » Tout est dit ! Il reste à en tenir compte sous votre dernier mandat, sans renoncement, sans faiblir, même si un État « n’est pas un ours qui danse » seul. Secouer la France pendant qu’il est temps. Les tablettes de l’histoire vous attendent non avec de la craie mais avec de la cire indélébile ! Dieu vous accompagne !
L’Afrique n’a pas été toujours heureuse avec la France. Il est temps, enfin, qu’elle tente d’être heureuse avec elle-même. D’ailleurs, elle n’a plus le choix. Ses enfants ont juré de tourner la page. On ne demande pas la permission de prendre ce qui vous appartient !
La jeunesse africaine s’est constituée aujourd’hui comme la courtière des états-majors des coalitions contre ce qu’elle considère comme les dérives et les excès de la France. Elle ne demande qu’à être convaincu du contraire ! Cette jeunesse ne veut ni de « mais », ni de « si », ni de « car ». Mais jusqu’où cela mènera-t-il ? La France peut-elle ravaler ce que l’on considère comme une morgue, cette « contenance hautaine et méprisante », être plus onctueuse, avoir l’humilité, le courage, la force et la vision de changer d’âme ? Oui, c’est bien d’âme qu’il s’agit ! Un long, très long cycle s’achève. C’est une loi naturelle. Il faut l’accepter, l’accompagner, avant le chaos !
L’Afrique, quant à elle, ne peut plus et ne doit plus attendre, mais elle a l’exigence et l’élévation de renoncer aux nationalismes étroits, au lynchage aveugle. Ses dirigeants politiques doivent cesser d’être des flâneurs qui tiennent une tortue en laisse pour avancer. Le temps presse. Les peuples ne peuvent plus attendre et ils n’attendront plus. Tout se paie cash, désormais !
Oui, le temps a passé. De nouvelles générations africaines sont arrivées. Elles ne doivent pas se tourner vers le passé colonial si justement décrié et condamné, mais avancer vers l’essentiel, porter leurs propres rêves, leur propre époque, leur propre générosité, leurs propres refus, leurs propres armes. Cette jeunesse africaine doit porter la nouvelle dignité de l’Afrique après que des chefs d’États l’ont piétinée, vendue. Elle a le devoir d’avancer sans se retourner en commençant par son propre continent et ceux qui, en le gouvernant, le mènent vers le gouffre.
La France comme tous les autres pays et nations étrangers ne défendent finalement que leurs intérêts, avec plus ou moins de respect et d’élégance. Le mal comme le venin sont d’abord, en Afrique, à l’intérieur de nous-mêmes et en nous-mêmes.
La jeunesse africaine doit être écoutée, respectée. Tant pis pour ceux qui tardent à le comprendre. Le respect, c’est d’abord l’inviolabilité de la liberté d’autrui, même si elle nuit à la vôtre ! En somme, respectons la liberté de chacun !
L’Afrique a désormais fait son choix. Elle ne reculera pas. Ceux que les peuples ont élu doivent se réinventer, à défaut d’être réinventés par la rue nombreuse, trompée, trahie, fatiguée, affamée. À la France, également, de faire son choix au regard de son bilan avec l’Afrique des colonies. Si la justice, l’éthique, la fraternité et le respect mutuel sont possibles, adhérons-y tous ensemble et inventons, « épaule contre épaule », un nouvel ordre moral de coopération économique, un avenir de paix, de justice, de partage, de prospérité, en commun !
Qui disait que « celui à qui on a prêté des ailes dont le propriétaire finit par exiger la restitution en plein vol, aura bien du mal à regagner la terre ferme sans dommage » ! L’Afrique doit se construire ses propres ailes. Cela est possible ! Levons-nous sans tarder ! l’Afrique ne peut plus se contenter de sandwichs avec des pâtés de rat mort ! La France également a le droit d’être conquérante, de vivre et de prospérer, mais sans cette conscience morale fétide, coupable et ce jeu de dupe et de cache-cache avec les biens et les intérêts de l’Afrique ! Il est devrait être possible désormais de faire sa sauce, sans les larmes de l’Afrique depuis tant de siècles ! Sa jeunesse a décidé de mettre fin à ses pleurs ! Il n’y a plus de place en elle pour archiver les douleurs et des rabaissements.
Le Clézio écrit ceci : « Qu’il y a des êtres que l’on ne peut changer. Ils reviennent toujours tels qu’ils étaient. Ils ont choisi d’être ce qui convient à ce qu’ils sont profondément à l’intérieur d’eux-mêmes. » A méditer !
La France est belle si elle vient vers nous sans maquillage ! Vraie et fraternelle !